Miroir, mon beau miroir…

Les spécialistes de l’enfance expliquent qu’avant 18 mois, confronté à son reflet dans un miroir, un bébé ne se reconnait pas : il croit voir un autre enfant.

Ce n’est que parce que ses parents lui expliqueront qu’il est ce qu’il voit qu’il pourra prendre conscience de sa propre existence.

Le strict reflet que nous renvoie la glace est froid : il ne nous apprend rien. Ce sont les autres qui nous disent ce que nous pouvons y voir.

Sans ce tiers regard, il nous est impossible d’accéder à notre individualité, de savoir ce que nous valons, de croire en nous, de connaître nos qualités, etc…

Alors que la reconnaissance est souvent au centre des études, enquêtes ou baromètres d’entreprise, il est important de revenir au sens même de cette notion.

Le mot même de reconnaissance peut en effet être trompeur.

Le RE de reconnaissance laisse parfois penser qu’il s’agit d’une notion secondaire. Il y aurait connaissance puis ensuite re-connaissance. On pourrait entendre ce RE comme un préfixe de répétition, comme dans mariage et re-mariage ou belote et re-belote.

Ce RE est en réalité un préfixe réfléchi, celui du miroir qui RE-flète, ou comme dans envoyer/renvoyer, partir/revenir, etc.

Si la connaissance est constituée de ce que j’ai appris sur le monde, par le regard que je porte sur l’extérieur, la reconnaissance se définit à l’inverse comme ce que le monde sait de moi, par le regard que les autres portent sur moi.

En ce sens, reconnaître est la tournure réfléchie de connaître :

Reconnaître, c’est se connaître soi.

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Cela signifie qu’en réalité, en entreprise, ce n’est pas le manager qui reconnait le collaborateur : l’expression « reconnaître ses collaborateurs » qu’on emploie souvent, apparait alors comme un raccourci trompeur, qui amène parfois les managers à croire qu’il leur faudrait absolument des éléments tangibles permettant de matérialiser cette reconnaissance (augmentation, statut, table de ping-pong ou baby-foot !). Si ceux-ci nourrissent ce que l’on appelle la reconnaissance « symbolique », l’enjeu majeur reste la reconnaissance « imaginaire » : ce que le collaborateur attend, c’est d’abord que son manager lui renvoie une image dans laquelle il pourra se re-connaître, c’est-à-dire apprendre à mieux se connaître lui-même.

Au manager d’apporter la plus grande attention possible à toutes les occasions de nourrir cette re-connaissance, par exemple :

  • Au quotidien, lors des contacts informels, en s’intéressant à ce qui l’intéresse (reconnaissance inconditionnelle, centrée sur la personne, sur ce qu’elle est et non sur ce qu’elle fait) ;
  • Pour lui demander son avis, avant une prise de décision ou sur un sujet X ou Y (reconnaissance intégrative) ;
  • Sur le travail, soit pour valoriser l’engagement, l’initiative, l’implication, soit pour souligner la qualité de telle ou telle pratique, soit pour mettre en lumière un progrès ou un succès – et la manière d’y arriver (reconnaissance instrumentale, centrée sur les moyens mis en œuvre, reconnaissance finale, portant sur le résultat).

Et vous comment faites-vous pour nourrir la re-connaissance ?